Un mot du directeur du Monde Diplomatique

Il y a tout juste soixante ans, le 29 novembre 1947, l'Assemblée générale des Nations unies divisait la Palestine en deux États, l'un juif et l'autre arabe. Mais la guerre de 1948 a débouché sur un tout autre partage. Seul Israël a vu le jour. Il s'est partagé avec la Jordanie et l'Égypte le territoire de l'État arabe mort né. Et 800 000 Palestiniens ont dû prendre le chemin de l'exil.

Le Proche-Orient est ainsi entré dans une escalade tragique, rythmée par six guerres généralisées et deux Intifadas, plus la guerre civile libanaise et les conflits dans le Golfe. Soixante ans plus tard, c'est même de chaos qu'il faut parler : non contents de s'être enfoncés dans un bourbier sanglant en Irak, les Etats-Unis menacent de bombarder l'Iran ; le Liban est à nouveau au bord du gouffre ; et, au-delà des rencontres symboliques, l'impasse israélo-palestinienne paraît totale.

Plus que jamais, dans cette région comme ailleurs, seule la mise en œuvre du droit international, tel que défini par les Nations unies, peut permettre une désescalade. La création d'un véritable État palestinien aux côtés d'Israël constitue sans nul doute la condition nécessaire – même si elle n'est pas suffisante – d'un apaisement de toute la région.

C'est d'abord la responsabilité de la communauté internationale, qui doit imposer l'exigence d'un retour au principe du partage. C'est donc aussi celle des gouvernements, à commencer par le nôtre, à qui il revient, comme toujours, d'inciter ses partenaires de toute l'Union européenne à agir dans ce sens. Mais il incombe aux opinions de pousser les dirigeants à s'engager.

Les créateurs, ont le sait, jouent un rôle pionnier dans l'éveil des consciences. Et c'est particulièrement vrai de ceux qui œuvrent dans les industries culturelles de masse. Par l'extraordinaire richesse de leurs films, les cinéastes israéliens, leurs confrères palestiniens et, plus généralement, ceux du Proche-Orient en témoignent aux yeux du monde : au cœur des conflits qui ravagent la région, des hommes et des femmes souffrent, mais se battent.

Voilà ce que peut le cinéma : faire surgir, derrière les noms de pays synonymes de guerre, les visages d'êtres humains assoiffés de paix. Nos frères, nos sœurs en désespoir et en espoir. C'est tout le mérite de ce Festival de nous les faire rencontrer.

Ignacio Ramonet





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